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sur la
Colonisation-Décolonisation
française

Lettre ouverte à M. Boutéflika,
Président de la République algérienne

De l'Histoire Convenue
de l'Algérie Française
à l'Histoire Déconvenue de
l'Algérie Algérienne

Histoire de l'Algérie Française

De Bonne Source :

-Socialistes et Colonisation
-Des Colonisés et la Colonisation
-Décolonisés sur la Décolonisation
-Colonisateurs et la Colonisation
-Décolonisateur et Décolonisation


DE BONNE SOURCE
PETITE ANTHOLOGIE POUR FACILITER LES DEVOIRS
DE MEMOIRE ET DE REPENTANCE

AVERTISSEMENT
AVANT DE S'ESSUYER LES PIEDS POUR ENTRER
DANS LE LABYRINTHE MYTHIQUE DES DEVOIRS
DE MEMOIRE ET DE REPENTANCE

Les dernières années du XXème siècle et les premières du XXIème voient les hommes politiques et les media développer quelques idées forces dont le seul objet est d'éluder des difficultés nées d'une décolonisation calamiteuse et qu'aucun gouvernement de la Vème République n'a osé traiter.

C'est l'épanouissement de la langue de bois, l'avènement de néologismes et l'invention de nouveaux concepts dont le seul but est de détourner l'attention du citoyen afin de lui cacher la réalité de la situation.

Ainsi nos hommes politiques velléitaires (c'est à dire qui n'ont que des intentions faibles et qui ne décident pas à agir) vont-ils substituer à la notion de «volonté» celle beaucoup plus illusoire de «volontarisme». La définition du «Robert» ne laisse pourtant place à aucune interprétation : est volontariste la personne qui croit soumettre le réel à ses volontés. N'est-ce pas déjà le premier symptôme de la faiblesse de celui qui s'en prévaut.

Ainsi a-t-on inventé le concept du «devoir de mémoire» qui n'engage personne dans la mesure où, par définition, la mémoire est aléatoire. Qui peut contester le caractère fluctuant de la mémoire quand tant d'expressions en relativisent la valeur : perte de mémoire, trou de mémoire, trouble de la mémoire, mémoire courte, mémoire sélective, mémoire infidèle...

Pour qui observe l'émergence d'un tel concept, la manipulation de l'opinion publique est évidente : il s'agit d'imposer un prétendu devoir de mémoire pour échapper aux dures contraintes du devoir de vérité.

Et si d'aventure, un inconséquent cherchait à perturber le cérémonial thérapeutique de ce devoir de mémoire salvateur, en introduisant dans le Temple cette malheureuse Vérité jusqu'alors enfermée au fond de son puits, les grands prêtres ne manqueraient pas de prononcer l'excommunication de l'hérétique pour «révisionnisme» (encore un néologisme surgi de l'après-guerre).

Et voilà pourquoi votre fille est muette !

Ainsi enclenchée, la logique conduit tout naturellement à la «repentance» (dans l'édition du petit Robert de 2003 elle n'existe pas encore). Ses forgerons espèrent que, proclamée sur tous les tons, elle suffira à écarter les dangers, aussi réels que quotidiens, qui menacent la France.

Depuis que l'Homme existe, il recourt aux grigris, amulettes et autres formules magiques, pour conjurer les mauvais sorts et amadouer les Esprits. Avec quels succès !

Et si, en élèves consciencieux, nous nous efforcions de satisfaire le devoir de Vérité !

C'est à l'usage de ces audacieux que je livre, en vrac et bruts de décoffrage, ces quelques éléments de construction qui permettront de faciliter l'édification d'un ouvrage bien difficile à réaliser. Il suffit, pour le coup, de bonne volonté.

JEAN – PIERRE BRUN

CHAPITRE I
SOCIALISTES ET COLONISATION

LOUIS BLANC (I811-1886)
Ce grand bourgeois se mêle peu à peu au mouvement socialiste. Père des Ateliers Nationaux de 1948, élu à l'Assemblée en 1878, il siégea à l'extrême gauche jusqu'à sa mort.

«La délivrance de la Méditerranée était une nécessité glorieuse. En forçant la barbarie dans son dernier asile, la France se montrait fidèle, une fois de plus, à son rôle historique : elle abritait la civilisation.»

JULES FERRY (1832 – 1893)
Franc-maçon et anticlérical farouche, ministre de l'Instruction publique et des Affaires étrangères, Président du Conseil, il est à l'origine du protectorat français en Tunisie, de la colonisation du Congo, de la pacification de Madagascar et de la présence française en Indochine.

«Les races supérieures, c'est à dire les sociétés occidentales parvenues à un haut degré de développement technique, scientifique et moral, ont à la fois des droits et des devoirs à l'égard des races inférieures.»

«Partout doivent reculer les antiques puissances de l'ignorance, de la superstition, de la peur, de l'oppression de l'homme par l'homme. Ainsi l'action colonisatrice est- elle fondamentalement définie comme une oeuvre d'émancipation : par elle, et à travers elle, se poursuit la lutte, entreprise depuis plus d'un siècle au nom de l'esprit de Lumière, contre l'injustice, l'esclavage, la soumission aux Ténèbres... Il s'agit d'une nouvelle croisade civilisatrice.»

«Nécessité d'avoir sur les mers des rades d'approvisionnement, des abris, des ports de défense et de ravitaillement.»

Alfred Rambaud le biographe de Jules Ferry écrira dans son ouvrage de 1886 : «La France est presque la seule nation qui se soit approchée de la solution pour l'administration des races étrangères : elle ne détruit pas comme ont fait trop souvent les autres peuples ; elle sait mieux que personne se les assimiler... Elle seule, jusqu'à présent, a osé concevoir la métropole et les colonies comme formant une seule patrie, un seul Etat.»

JEAN JAURES (1832 - 1914)
D'abord socialiste indépendant il rallia une fédération autonome avant de devenir l'un des dirigeants des Socialistes français à la chambre où il siégeait encore à sa mort.

«Quand nous prenons possession d'un pays, nous devons y amener avec nous la gloire de la France, et soyez sûrs qu' on y fera bon accueil, car elle est pure autant que grande, pénétrée de justice et de bonté. Nous pouvons dire à ces peuples sans les tromper que où la France est établie, on l'aime ; que là où elle ne fait que passer, on la regrette ; que partout où sa lumière resplendit, elle est bienfaisante ; que là où elle ne brille plus, elle a laissé derrière un long et doux crépuscule où les regards et les cœurs restent attachés.»

EMILE ZOLA (1840 – 1902)

«L'Afrique est le complément naturel de la Métropole à laquelle elle est intimement soudée...Ce royaume appartiendra au laboureur qui a osé la prendre, s'y tailler à son gré un domaine aussi vaste que la force de son travail l'aura créée.»

LEON BLUM (1872 - 1950)
Fondateur du groupe de l'Unité Socialiste en 1901. Dirigeant de la S.F.I.O. (Section française de l'internationale ouvrière). Président du Conseil, ministre, député.

«Nous admettons le droit et même le devoir des races supérieures d'attirer à elles celles qui ne sont pas parvenues au même degré de culture et de les appeler aux progrès réalisés grâce aux efforts de la science ou de l'industrie.»

MARIUS MOUTET (1876 – 1968)
Avocat socialiste lyonnais, il fut ministre des Colonies (1936 – 1938) puis de la France d'Outre- Mer (1946 – 1947)

«Une politique coloniale socialiste aura d'autant plus de chance d'être constructive et durablement féconde, qu'elle se préoccupera moins de communiquer d'une manière directe l'idéologie socialiste aux indigènes. Il faut prendre garde au déchaînement de forces incontrôlables qui pourraient sortir d'une action où des notions mal digérées de lutte des classes, certains fanatismes religieux, la nature émotive des Africains, la dissimulation islamique et asiatique et toutes sortes d'influences souterraines se rencontreraient en des réactions complexes et imprévisibles.»(1936)

MAURICE THOREZ (1900 - 1964)
Secrétaire Général du Parti Communiste Français. Ministre d'Etat (gouvernement provisoire du général de Gaulle en 1945), vice-président du Conseil (1946 – 1947).

«Ne trouverait-on pas ici, parmi vous peut-être, les descendants de ces anciennes peuplades numides, civilisées déjà au point d'avoir fait de leurs terres le grenier de la Rome antique ; les descendants de ces Berbères qui ont donné à l'Église catholique Saint Augustin, l'évêque d'Hippone, en même temps que le schismatique Donat ; les descendants de ces Carthaginois, de ces Romains, de tous ceux qui, pendant plusieurs siècles ont contribué à l'épanouissement d'une civilisation attestée encore aujourd'hui par tant de vestiges ?... Sont ici maintenant les fils des Arabes venus derrière l'étendard du Prophète, les fils aussi des Turcs convertis à l'islam venus après eux en conquérants nouveaux, des Juifs installés nombreux sur ce sol depuis des siècles. Tous ceux là mêlés sur votre terre d'Algérie auxquels se sont ajoutés des Grecs, des Maltais, des Espagnols, des Italiens et des Français...» (le 11 juin 1939)

ALBERT BAYET (1880 – 1961)
Universitaire, anticlérical, journaliste aux «Lettres Françaises» et à «Franc- Tireur» .Président de la nouvelle presse française issue de la Résistance. Membre de la Ligue des Droits de l'Homme.

«Apporter la science aux peuples qui l'ignorent, leur donner routes, canaux, chemins de fer, autos, télégraphe, téléphone, organiser chez eux des services d'hygiène, leur faire connaître enfin les droits de l'Homme, ce n'est pas une besogne d'impérialisme, c'est une tâche de fraternité.»

«Le pays qui a proclamé les droits de l'Homme, qui a contribué brillamment à l'avancement des sciences, qui a fait l'enseignement laïque, le pays qui, devant les nations, est le grand champion de la liberté a, de son passé même, la mission de répandre partout où il le peut, les idées qui ont fait sa propre grandeur.»

FRANCOIS MITERRAND (1916 – 1996)
Ministre de l'Intérieur (cabinet Mendès – France) du 19 juin 1954 au 23 février 1955. Ministre d'État, Garde des Sceaux (cabinet Guy Mollet) du 1er février 1956 au 13 juin 1957. Premier secrétaire du Parti Socialiste (16 juin 1971)

«L'Algérie c'est la France, et la France ne reconnaîtra pas chez elle d'autre autorité que la sienne.».Le 12 novembre 1954 devant l'Assemblée Nationale.

«Si la politique actuelle est bonne, il fallait la faire plus tôt ; si elle est mauvaise, c'est Salan qui a raison et il a, sur Debré, l'avantage de ne s'être pas contredit.» Le 23 mars 1962 devant le Sénat.

PIERRE MENDES FRANCE (1907 – 1982)
Franc-maçon, collaborateur de Léon Blum pendant le Front Populaire. Membre du Parti Radical Socialiste. Président du Conseil du 19 juin 1954 au 23 février 1955.

«L'Algérie c'est la France. On ne transige pas lorsqu'il s 'agit de défendre l'intégrité de la République.» Le 12 novembre 1954

«Si l'on suivait Bidault et Soustelle, il y aurait 25 millions de musulmans français dans la métropole. Merci à de Gaulle s'il peut éviter cela.» (entretien du 10 décembre 1959 avec le journaliste Bernard Lefort.)

ROBERT LACOSTE (1898 - 1989)
Secrétaire de la Fédération générale des fonctionnaires C.G.T. Membre de la Ligue des Droits de l'Homme. Membre de la S.F.I.O. Ministre de la production industrielle (cabinet Blum 1946 -1947 et cabinet Ramadier 1947) Ministre de l'Industrie (cabinet Ramadier 1947) Ministre de l'Industrie et du Commerce (cabinet Schuman 1947-1948, cabinet Marie 1948, cabinet Schuman 1948, cabinet Queille 1948-1949, cabinet Bidault 1949-1950). Ministre des Affaires économiques et financières (cabinet Mollet 1957) Ministre de l'Algérie (cabinet Bourgès-Maunoury 1957 et cabinet Gaillard 1957-1958)

«Nous resterons en Algérie, non pas parce que nous sommes les plus forts, mais parce que nous avons raison.»

SYLVIANE AGACINSKI – JOSPIN

«Notre époque doit apprendre à se libérer du passé...L'oubli du passé de leurs parents est un droit des nouvelles générations.»

CHAPITRE II
DES COLONISÉS ET LA COLONISATION

EMIR ABD EL KADER (1808-1883)
Le célèbre chef qui s'opposa militairement à l'occupation française avant de faire sa reddition au Duc d'Aumale le 24 Décembre 1847, prononça cette prière en 1871 à la suite de l'insurrection déclenchée en Algérie par Mokrani :

«Nous prions le Tout Puissant de punir les traîtres et de confondre les ennemis de la France»

HADJ BELLOUL
Ce saint homme musulman prophétisa ainsi en 1878 :

«Les Français partiront un jour et vous chercherez en vain un de leurs chapeaux pour l'embrasser. Vous songerez alors, un peu tard, à tous les bienfaits dont ils vous comblaient et de vos yeux couleront des larmes de sang.»

SAID BOUALEM (1906-1982)
Ce bachaga, commandant de l'armée française, député et vice-président de l'Assemblée Nationale en 1962 interpella ainsi le français métropolitain moyen qui s'apprêtait à voter l'indépendance de l'Algérie :

«La France est mon pays, au même titre que vous Monsieur Dupont ? Nous l'avons défendu dans le même uniforme, sous le même drapeau, le sang des vôtres et des miens s'est mêlé pour défendre cette terre sur laquelle je ne suis pourtant pas né.»

FERHAT ABBAS (1899 – 1985)
Ce pharmacien, se lança très tôt dans la politique. Il fut l'initiateur du Manifeste du Peuple Algérien. Il rallia le F.L.N. Le 22 avril 1956. Premier président du Gouvernement Provisoire de la Révolution Algérienne en septembre 1958 il fut le premier président de l'Assemblée Nationale algérienne.

«L'indigène est appelé (dans l'armée française parce qu'il est Français et qu'en cette qualité il doit payer l'impôt du sang. Nous sommes indigènes et nous sommes français.» (1926)

«Si j'avais découvert la nation algérienne je serais nationaliste et je ne rougirais pas comme d'un crime. Les hommes morts pour l'idéal patriotique sont journellement honorés et respectés. Ma vie ne vaut pas plus que la leur. Et cependant je ne mourrai pas pour la patrie algérienne parce que cette patrie n'existe pas. Je ne l'ai pas découverte. J'ai interrogé les vivants et les morts... J'ai visité les cimetières...Personne ne m'en a parlé. On ne bâtit pas sur du vent. Nous avons, une fois pour toutes, écarté les nuées et les chimères pour lier définitivement notre avenir à celui de l’œuvre française dans ce pays.» (1936)

«C'est bien la pensée française qui est à la base de notre vie morale. A l'empirisme du patrimoine laissé par nos parents et la tradition, l'âme des écrivains français est venue apporter une explication, si j'ose dire, scientifique et rationnelle.»

«On a modernisé l'Algérie...Les résultats satisferaient les plus difficiles. On n'a omis qu'une chose essentielle : moderniser ses habitants. Et on est arrivé ainsi à un anachronisme frappant. Sur une terre européenne, aux cadres européens, vivent six millions d'orientaux.» (lettre adressée au maréchal Pétain le 10 avril 1941)

«Le problème capital, en Algérie, le seul problème qui se pose et qui demeure la clef de voûte de la réussite ou de l'échec d'un système de gouvernement est l'émancipation des paysans.
Ce n'est pas seulement par rapport aux Français que ce paysan demeure un étranger, c'est par rapport à tous ces habitants des villes, fussent-ils musulmans comme lui.
Paysan, écoute une voix amie. Ceux qui t'ont conseillé la rebellion te trahissent. Ils ont déshonoré tes malheurs. Hier, ils t'ont poussé contre de pauvres français qui n'étaient pas tes ennemis. Demain, ce sera contre d'autres musulmans, contre les Mozabites et puis les gens de la montagne contre les gens de la plaine.
La lutte de tribu à tribu recommencera. La féodalité arabe reprendra tous ses droits et tu crèveras sous d'autres privilèges, sous d'autres impôts, sous d'autres arbitraires.
L'anarchie s'établira et ton pays s'ouvrira à une autre colonisation.» (extrait du testament politique rédigé par Abbas en 1945)

«Il ne faut pas oublier que, historiquement, l'Algérie a été constamment gouvernée par l'étranger. Et pourquoi ? Il y a une réponse à cela. Notre peuple a une tendance profonde à rester au stade de la tribu. Il ne veut pas que la loi soit l'expression de la volonté de tous. Il s'en tient à la société de type féodal, au culte de la personnalité et accepte volontiers le fait du Prince. Il décapite son élite au fur et à mesure de sa formation. Aussi repart-il toujours à zéro. Cette conception médiévale de l'état est un handicap certain.» (1981)

MOULOUD FERAOUN (1913-1962)
Écrivain algérien de langue française assassiné par l'O.A.S. Le 15 mars 1962.

«Quand l'Algérie vivra, je souhaite qu'elle se souvienne de la France et de tout ce qu'elle lui doit.»

ABDERRHAMANE FARES (1911-1991)
Notaire, il fut président de l'Assemblée algérienne en 1953. Président de l'Exécutif provisoire algérien le 26 mars 1962.

«S'il est en Algérie un domaine où l'effort de la France ne se discute pas, c'est bien le domaine de l'enseignement. On peut et on doit dire que l'école a été un succès certain. Les vieux maîtres, les premiers instituteurs ont apporté toute leur foi pédagogique sans arrière pensée et leur influence a été extrêmement heureuse.»

«Vous savez, Monsieur Susini, que vous avez joué la mauvaise carte depuis bien longtemps. J'ai été Algérie française autant que vous. Mais je me suis rendu compte depuis de nombreuses années que la France allait nous répudier...
Lorsque de Gaulle a repris les affaires françaises en main, je pense avoir été un des tout premier avertis de ses véritables desseins quant à l'Algérie...Je fus stupéfait de voir que le Général croyait déjà qu'il était dans l'intérêt de nos deux pays de se séparer.» (confidence faite à Jean-Jacques Susini en juin 1962)

AUGUSTIN IBAZIZEN
Avocat, membre du Conseil d'État français, fils d'instituteur et petit-fils de paysan kabyle.

«La France a fait sortir la Kabylie de mille ans d'immobilisme.»

FELIX HOUPHOUET-BOIGNY
Ancien ministre français. Premier Président de la République de Côte d'Ivoire

«Les Anglais avaient été attentifs à coloniser des territoires riches et ils se sont beaucoup occupés de les mettre en valeur. Ils en ont fait profiter les Africains, mais ils les ont toujours considérés comme des étrangers. Les Français se sont moins souciés de trouver des richesses et de les exploiter, mais ils ont associé les indigènes à la direction des affaires politiques jusqu'aux échelons les plus élevés ; ils les ont initiés à la gestion d'un État et à la mise en place progressive de structures modernes. Cette expérience a beaucoup manqué aux anglophones, pour ne rien dire des lusophones ni de ceux qui avaient été colonisés par la Belgique et qui, à la différences des anglophones, n'avaient même pas été associés à l'administration territoriale ou locale» (propos rapportés par Jacques Foccart des Affaires africaines et malgaches)

«Qu'est-ce que l'Afrique ? Qu'est-ce que la Côte d'Ivoire ? Soixante tribus qui ne se connaissaient pas, qui n'avaient pas les mêmes dialectes, qui n'avaient pas la même façon d'organiser leur société. Les villages, tous les vingt cinq kilomètres étaient aussi éloignés que le Portugal de la Russie. Ces hommes, grâce à la colonisation, ont constitué un embryon de nation. Donc grâce à la colonisation, il y aura demain une nation ivoirienne.»

CHAPITRE III
DES DÉCOLONISÉS SUR LA DÉCOLONISATION

«Quand tu ne sais pas où tu vas, regarde d'où tu viens.» (Proverbe sénégalais)

AHMADOU KOUROUMA (Écrivain ivoirien)

«Nous attendaient le long de notre dur chemin les indépendances politiques, le parti unique, l'homme charismatique, le père de la nation...Puis les autres mythes : la lutte pour l'unité nationale, pour le développement, le socialisme, la paix, l'autosuffisance alimentaire. Salmigondis de slogans qui à force d'être galvaudés nous ont rendus sceptiques, pelés, demi-sourds, demi-aveugles, bref plus nègres que nous étions avant et avec eux.»

PETER ENAHARO (journaliste ivoirien)

«Nous sommes devenus experts à éveiller la conscience de nos anciens maîtres coloniaux. Parlons net, nous avons exercé un chantage infernal sur l'Europe occidentale. C'est un procédé tellement merveilleux pour se procurer l'aide étrangère. Le temps est venu pour l'Afrique de devenir adulte.»

MADEMBA SY (Ambassadeur du Sénégal en Autriche. Conseiller de l'O.N.U.)

«En 1960 la France a donné l'indépendance à ses possessions d'A.O.F. et d'A.E.F. Ancien officier français, je suis devenu colonel dans la jeune armée sénégalaise et conseiller militaire auprès du gouvernement sénégalais, sans problème. En servant mon pays, je reste fidèle à la France, à mes amis, à mes frères d'armes. Mais je veux dire avant tout ceci aux jeunes Français : la France est trop frileuse aujourd'hui. Elle n'ose plus se manifester dans les pays francophones. Elle fait un complexe. Elle a fait un travail magnifique du temps de son empire colonial (c'est exprès que j'utilise ce terme «colonial».
Maintenant c'est terminé, la page est tournée. On peut en parler et vivre ensemble sans hargne, ni fausse honte, ni ressentiment. Vous avez bien été colonisés par les Romains, nous ce fut par les Français. Mais nous avons encore, nous les jeunes nations, un besoin immense de techniciens, de spécialistes, de formateurs. On fait appel à vous et vos dirigeants hésitent : «nous ne voulons pas être taxés de néo-colonialisme !».
Mais c'est idiot. Depuis plus de trente ans, nous sommes indépendants. Si les choses vont mal, ce n'est pas la faute des colonialistes, des méchants français ,belges ou anglais. Les jeunes africains savent bien que si cela va mal, c'est dû en grande partie à l'incapacité de leurs dirigeants actuels ! Il n'y a plus de ressentiment chez nous, sauf en Algérie, et encore ! Il s'est tissé entre la France et l'Afrique une belle amitié, on peut même parler d'amour.
Au lieu d'entendre notre appel, vous continuez à ressasser les faiblesses, les injustices, les fautes. Bien sûr il y eut des actions coupables. Cela est triste mais ne pèse rien à côté de tout ce qui nous a été donné si généreusement par ailleurs. Je vous le répète, on admire encore la France, on lui est reconnaissant de son oeuvre d'hier mais elle a encore des obligations pour demain.»

BOUALAM SANSAL (Écrivain et haut fonctionnaire algérien)

«Trente ans après l'indépendance, nous voilà ruinés avec plus de nostalgiques que le pays comptait d'habitants et plus de rapetoux qu'il n'abritait de colons.»

«Je suis un iconoclaste qui dénonce les mensonges de la guerre de libération. J'ose toucher à un mythe fondateur, mais un mythe est fait pour être discuté. L'Algérie a été construite par la France dont elle porte les valeurs du XIXème. Alger est une ville squattée. Ils sont loin d'avoir trouvé les clés. Aujourd'hui, elle tourne le dos à la méditerranée en regardant vers l'Iran et les pays arabes. Chez nous, les politiques s'expriment comme des imams ténébreux. La France est le centre du monde par son immense culture et sa liberté. C'est le pays de l'équilibre par excellence. La liberté est une notion riche et profonde en Occident. Ici, en guise de liberté, c'est le foutoir, l'apostrophe, l'insulte et la bagarre de rues.»

«En un siècle, à force de bras, ils (les colons) avaient d'un marécage infernal mitonné un paradis lumineux. Seul, l'amour pouvait oser un pareil défi. Mais comme on est à cran sur ce chapitre et que les élections reviendront bien un jour, on dira la passion possessive du colon et on oubliera l'amour que le travail patient fait germer dans les cœur les plus endurcis... Les cimetières chrétiens, livrés aux vents de l'abandon, furent souillés et saccagés. Cela est de notoriété, comme le sont la peine et la rage impuissante des rapatriés. Ces lieux ne sont pas seulement la sépulture des leurs, mais l'écot de leur indéfectible amour pour le pays. Quarante ans est un temps honnête, ce que nous semble, pour reconnaître que ces foutus colons ont plus chéri cette terre que nous qui sommes ses enfants.»

UN CHEF D'ÉTAT AFRICAIN AU MINISTRE FRANCAIS DE LA COOPÈRATION (Jean-François Deniau)

«Je ne peux te le demander officiellement, je dirai même le contraire, mais si tu es un ami, trouve moi des anciens administrateurs coloniaux. Eux, à la différence de ces jeunes technocrates qui se disent de gauche et tiers-mondistes, eux, au fond, ne nous méprisaient pas.»

UN CHEF MAURITANIEN (à Pierre Messmer, ancien ministre et premier ministre)

«Dans ce pays, pour survivre, il a toujours fallu faire trois choses : tuer, voler, mentir. Depuis que vous les Occidentaux vous êtes passés par là, tuer c'est quasiment impossible, voler c'est de plus en plus difficile. Qu'est-ce qu'il reste ?»

UN JOURNALISTE INDIEN (en 1980)

«Vous, Occidentaux, vous êtes si orgueilleux que vous vous croyez à la source de tous nos malheurs.»

CHAPITRE IV
LES COLONISATEURS ET LA COLONISATION

CHARLES DE FOUCAULD (1858 – 1916)
Officier. Explorateur. Ermite dans le Sahara algérien. Assassiné par des touareg

«Dans cet immense empire colonial acquis en 99 années qui pourrait être une source de tant de bien pour ces nations arriérées, ce n'est que cupidité, violence, sans nul souci du bien des peuples alors que nous devons élever leur esprit et leur caractère aussi haut que possible.»

«Coloniser, c'est élever intellectuellement et moralement.»

«Ma pensée est que si, petit à petit, doucement, les musulmans de l'empire colonial d'Afrique ne se convertissent pas, il se produira un mouvement national analogue à celui de la Turquie. Une élite intellectuelle se formera dans les grandes villes, instruites à la française, élite qui aura perdu toute foi islamique, mais qui en gardera l'étiquette pour pouvoir, par elle, influencer les masses.»

«Les musulmans du Sahara reçoivent leur fausse religion uniquement par confiance en leurs ancêtres, en leurs marabouts, en ceux qui les entourent, uniquement par l'autorité de ceux ci sur eux, et sans l'ombre d'un raisonnement ni d'un contrôle. Nous devons donc tâcher de gagner davantage leur confiance, d'acquérir plus d'autorité que ceux qui les entourent et les endoctrinent.»

«Prions pour ces infidèles des colonies françaises envers lesquels la France chrétienne a les devoirs de parents chrétiens envers leurs enfants» (à Dom Augustin, le 1er décembre 1912)

LOUIS-GASTON DE SONIS (1825 – 1887)
Général français qui au cours de sa carrière commanda notamment la subdivision d'Aumale en Algérie. Les musulmans admiratifs devant son comportement affiché de chrétien convaincu le surnommèrent «Moula el dine» le seigneur de la foi.

«Nous nous sommes faits professeurs de fanatisme, nous avons bâti des mosquées qu'on ne nous demandait pas.»

CHARLES LAVIGERIE (1825 – 1892)
Cardinal, archevêque d'Alger et de Carthage, fondateur des congrégations des Pères Blancs et des Sœurs Blanches, artisan du ralliement de l'église catholique française à la République, organisateur d'une campagne internationale pour l'abolition définitive de l'esclavage.

«Avec le Coran, dans mille ans comme aujourd'hui, nous serons des chiens de chrétiens et il sera méritoire de nous jeter à la mer.»

HUBERT LYAUTEY (1854 - 1934)
Maréchal de France. Haut commissaire au Maroc alors sous protectorat français.

«La pacification, l'action colonisatrice doivent progresser en «tache d'huile», souple mélange de politique d'amitié et de politique de force, de raids militaires se muant en essor économique et commercial.»

«La guerre coloniale n'a rien de commun avec les guerres entre les nations. Elle est une organisation qui marche, elle est constructive, celles-ci sont destructrices. Elle crée la vie et non des ruines. On ne s'empare pas d'un repaire comme d'une position, alors qu'il doit devenir un centre d'attraction, un marché, et que l'adversaire de la veille y sera le collaborateur de demain.»

«Manifester sa force pour en éviter l'emploi.»

«Ils (les indigènes) ne sont pas inférieurs, ils sont autres».

«On peut être certain qu'il est en train de naître à côté de nous, à notre insu, tout un mouvement d'idées, de conciliabules, de commentaires sur les événements mondiaux et sur la situation faite à l'islam, et qu'un de ces jours, tout cela prendra corps et éclatera, si nous ne nous en préoccupons pas et si nous ne prenons pas sans délai la direction de ce mouvement».

CHAPITRE V
DÉCOLONISATEURS ET DÉCOLONISATION

CHARLES DE GAULLE (1890 -1970)
Président du Conseil (1958) Président de la République (1959 -1969)

«Il ne faut pas se payer de mots ! C'est très bien qu'il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races, et qu'elle a une vocation universelle. Mais à condition qu'ils restent une petite minorité. Sinon la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne... Les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés avec leurs turbans et leurs djellabas ? Vous voyez bien que ce ne sont pas des Français ! Ceux qui prônent l'intégration ont une cervelle de colibri, même s'ils sont très savants. Essayez d'intégrer de l'huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d'un moment, ils se sépareront de nouveau.» (à Alain Peyrefitte le 5 mars 1959)

«Rejeter toute idée d'intégrer à la France les peuples de l'Empire, attrape - couillons qui finira par installer un président arabe à l'Élysée et faire de Colombey les Deux Eglises Colombey les Deux Mosquées.» (à Alain Peyrefitte)

«Après avoir de moins en moins supporté leurs colonisateurs, les peuples colonisés ne se supporteront plus eux-mêmes.» (à Alain Peyrefitte)

«La ruse doit être employée pour faire croire que l'on est où l'on n'est pas, que l'on veut ce que l'on ne veut pas... La surprise, il faut l'organiser, non seulement grâce au secret observé dans leurs propos, ordres et rapports par ceux qui connaissent et décident, ou par la dissimulation des préparatifs, mais aussi sous le couvert d'un voile épais de tromperies.» (Vers l'Armée de métier – 1934)

«Moi vivant, le drapeau vert et blanc du F.L.N. Ne flottera jamais sur Alger.» (Devant des officiers français rassemblés à Redjas lors de la «tournée des popotes» de mars 1960)

ROBERT BURON (1 910 – 1973)
Ministre des Transports et des Travaux Publics, désigné en 1962 par le général de Gaulle pour participer à la négociation des accords de paix en Algérie.

«Ma signature figure au bas d'un bien étrange document ; je n'en éprouve aucune satisfaction véritable.»

JEAN-FRANCOIS DENIAU
Inspecteur des Finances, ambassadeur de France en Mauritanie, secrétaire d'État à la coopération dans les ministères Messmer et Chirac

«Le général de Gaulle me demande un soir mon avis sur l'Algérie. Je fais une grimace. Le Général : «Vous voulez dire que c'est du boulot salopé ? C'est du boulot salopé. Je n 'avais pas le temps.».

«Nous laisserons en Indochine et ailleurs le regret d'une certaine liberté et d'une forme de respect de l'homme, même si tout empire a ses hypocrisies et ses bagnes. Si je dis une forme, c'est qu'il s'agit là d'héritages impalpables, qu'on ne peut compter ni mesurer, une façon d'être, de dire, de respirer. Seul résiste au temps l'air du temps»

«Lors des premières élections présidentielles en France au suffrage universel direct en 1965, après la mise en ballottage de de Gaulle, j'ai dû faire un appel solennel à la radio nationale(mauritanienne) pour rappeler que seuls les citoyens français votaient. Une queue impressionnante colorée de blanc et bleu de Mauritaniens, drapés dans leurs voiles et sortis du désert, s'était formée devant les bureaux de l'ambassade.
-On est venu pour voter pour le Général.
-Non, vous ne pouvez pas voter.
-Pourquoi on ne peut pas voter ?
-Parce que vous êtes indépendants.
-D'accord on est indépendants. Mais pas quand c'est grave.»

GUY GEORGY
Administrateur des Colonies en poste en Afrique en pleine période de décolonisation.

«L'Afrique, nous l'avons assassinée avec nos utopies. Il fallait continuer à structurer ces pays pour leur permettre de rentrer dans la communauté des nations. Il fallait continuer les efforts pendant au moins deux ou trois générations. On a lâché les Africains dans la nature, ils sont perdus...Un pays africain, c'est aujourd'hui une poignée de vrais profiteurs, dix mille parasites, puis un trou gigantesque.»

«L'Asie est une fourmilière en action, l'Afrique est une fourmilière au repos.»

HENRI DE MONFREID
Écrivain, navigateur, explorateur de la Corne de l'Afrique.

«Le jour où l'Afrique sera indépendante et décolonisée, une moitié de l'Afrique mettra une chaîne à l'autre et lui dira... tu es mon esclave.»

FERHAT ABBAS

«L'Algérie, pays mal aimé, ballotté par le vent des passions humaines, fut meurtrie, appauvrie, mutilée. Après le drame de la guerre, les musulmans connaîtront celui du vide et de la solitude.
La communauté française, à cause des erreurs qu'elle a commises, s'est exilée de l'autre côté de la Méditerranée. Malgré l'accueil de la France, ces Français pleurent le pays qui les a vu naître. Les Algériens, de leur côté, pleurent un grand nombre d'entre eux. D'autres cadres sont venus de toute l'Europe. Ces cadres ne valent pas ceux que l'Algérie a perdus.
L'Algérie est un vaste pays où beaucoup de choses restent à faire. Tous ses enfants y avaient leur place. La République algérienne, édifiée par les uns et les autres, pouvait dans les meilleures conditions, multiplier les richesses du pays, assurer son développement et sa prospérité et guérir ses blessures.
Ces Français qui avaient grandi au milieu de nous et qui étaient aussi Algériens que nous, «étaient un maillon qui rattachait notre pays à la civilisation et à la technique française. Nous, Musulmans, étions un autre maillon qui liait ce même pays à l'Orient et à l'Afrique. Nos chances de succès étaient doubles.» (1981)

UN HAUT FONCTIONNAIRE ALGERIEN
à un journaliste français rapatrié, à l'occasion du 28ème anniversaire de la naissance de la République algérienne.

«De Gaulle nous a bien baisés ! Vous, les Pieds-Noirs, en vous trahissant et nous, en nous poussant dans une indépendance pourrie.»

SALAH BITAR
Ministre syrien à Ferhat Abbas. Propos rapporté par ce dernier.

«Si la France était restée vingt ans de plus, elle aurait fait de l'Algérie un pays européen.»

HOCINE AIT AHMED
L'un des chefs historiques du F.L.N lors du déclenchement de la guerre d'Algérie le 1er novembre 1954.

«L'Algérie, du temps de la France, mais c'était le paradis ! Des fleurs, des fruits, des légumes partout, des restaurants. C'était la Côte d'Azur.» (propos recueilli par Christine Clerc)